Écoutez maintenant: Développement de l’économie numérique : quelles opportunités pour l’inclusion financière en Afrique ?
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Ce webinaire explore les enjeux et opportunités de développement de l’économie numérique sur le continent africain et son impact sur l’inclusion financière.
Pour débattre sur les enjeux et opportunité du développement de l’économie numérique pour les pays d’Afrique Digital Frontiers Institute a invité sur ce webinaire deux éminents panélistes que sont :
- Mr Abosse AKUE-KPAKPO, qui est le Directeur de l’Economie Numérique à la Commission de l’UEMOA. basé au Burkina Faso ;
et
- Dr Tiburce AGBIDINOUKOUN, professeur à la Brest Business School basé en France
Ainsi l’économie numérique peut être définie comme un ensemble d’activités économiques, créatrices de valeur et d’emplois qui sont transformées par les technologies de l’information et de la communication. Les trois principaux acteurs de cette économie sont les entreprises professionnelles (les entreprises de télécommunications, les producteurs d’équipements, les développeurs logiciels/systèmes d’exploitation), les entreprises de l’économie des TIC (plateformes de commerce électronique, business des media sociaux) et les particuliers qui utilisent les TIC dans les usages quotidiens.
ÉTAT DES LIEUX DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE EN AFRIQUE
Les échanges au cours de ce webinaire ont permis de dresser un état des lieux qui révèle que le continent africain a l’avantage de disposer d’une population très jeune née à l’ère du numérique, de quelques champions de l’économie numérique tels que le Kenya, l’Afrique du Sud, le Nigéria ou encore le Bénin dans la zone UEMOA et d’un fort accès aux services de mobile money. Des efforts ont été fournis aussi bien sur les plans de la pénétration des réseaux mobiles, l’identification unique des personnes physiques, la protection des données à caractère personnel et la lutte contre la cybercriminalité.
Toutefois, malgré l’existence de quelques champions, le continent pris dans son ensemble accuse encore d’importants retards qui se font ressentir en termes de déficit d’infrastructures de télécommunications accessibles dans les zones rurales, de coUt d’accès élevé à la connexion Internet, de manque d’éducation numérique et financière, de prolifération des cyber arnaques et l’absence de systèmes de paiement interopérables et inclusifs.
Le recours à des infrastructures détenues exclusivement par des firmes occidentales et la prolifération des monnaies privées virtuelles (Bitcoin, Ethereum) posent aussi un problème de souveraineté numérique. Les panélistes s’accordaient sur le fait que la souveraineté numérique de l’Afrique ne peut être assurée à 100% malgré des investissements sous formes de constructions de data centers nationaux pour la simple raison que plusieurs infrastructures (câble sous-marin, satellites) et équipements des utilisateurs (user devices) qui collectent ou transmettent des données ne sont pas fabriqués et administrés par des africains.
Par ailleurs les cadres légaux et réglementaires portant sur la protection des données à caractère personnel, la cybersécurité bien qu’en place nécessitent des efforts d’harmonisation.
A l’échelle de la zone de l’UEMOA, une initiative entend accélérer la transformation digitale dans les 8 Etats membres. Il s’agit du Programme Régional de Développement de l’Economie Numérique (PRDEN).
LE PROGRAMME RÉGIONAL DE DÉVELOPPEMENT DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE (PRDEN) DE L’UEMOA
Ce programme concu par la Commission de l’UEMOA interviendra sur quatre axes que sont :
• Le renforcement de la gouvernance du secteur de l’économie numérique par la mise en place de textes réglementaires communautaires applicables à certains domaines (intelligence artificielle, protection des données), le lancement d’un « Guide pour un comportement responsable sur les réseaux sociaux » et des actions visant à accroître la confiance des usagers aux instruments financiers numériques
• L’amélioration de l’accès des populations au numérique par le déploiement d’infrastructures, l’éducation numérique et financière,
• L’accroissement de l’offre de services numériques
• Le développement de l’innovation et de la recherche
Le programme permettra entre autres de créer 80 cases numériques entièrement équipées et connectées dans les zones rurales des Etats membres et de digitaliser 120 services numériques dans chaque Etat membre
RECOMMANDATIONS POUR DÉVELOPPER L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE EN AFRIQUE ET ACCÉLERER L’INCLUSION FINANCIÈRE ET SOCIALE
Voici quelques recommandations formulées par les panélistes pour accélérer une transformation digitale inclusive des économies africaines sur les plans du développement des infrastructures, la protection des données à caractère personnel, la souveraineté numérique, l’identification numérique, la sécurité numérique et du développement du commerce électronique.
Développement des infrastructures
– Rendre disponible les infrastructures d’accès à l’Internet haut débit et très haut débit jusqu’au dernier kilomètre ;
– Doter chaque pays d’un data center national (trois pays de l’UEMOA en disposent déjà)
Souveraineté numérique et protection des données personnelles
– Prendre un texte à l’échelle de l’UEMOA qui impose que toutes données des populations soient stockées dans l’Union ;
– Réfléchir à des programmes de sécurisation des données des pays d’Afrique à l’image de la Chine qui restreint l’accès à des plateformes telles que Google dont le modèle économique est de collecter des données de ses utilisateurs en échange de ses leurs services ;
– Instaurer de bonnes habitudes en matière de protection des informations gouvernementales (interdiction pour les hauts fonctionnaires de l’Etat et les membres du gouvernement d’utiliser des messageries privées telles que Yahoo mail ou Gmail) ;
– Ratifier la convention de l’Union Africaine sur la cybersécurité et la protection des données à caractère personnel afin qu’elle entre en vigueur ce qui faciliterait l’harmonisation des cadres réglementaires ;
– Signer une convention entre le PRDEN et les Autorités de Protection des Données Personnelles des pays de l’UEMOA pour harmoniser leurs cadres réglementaires.
– Concevoir nos propres monnaies numériques à l’instar du Nigéria en réponse à la prolifération des monnaies privées virtuelles et décourager la spéculation
Identification numérique
– Encourager l’identification numérique unique mais en gardant à l’esprit qu’elle n’est pas une condition sine qua non pour offrir des services numériques (la France ne l’a pas tandis qu’elle existe au Canada)
Sécurité numérique
– s’inspirer d’expériences réussies d’un ou deux Etats de l’UEMOA pour harmoniser le cadre de sécurité numérique du cyber espace de l’UEMOA. (L’exemple du Bénin avec son acte de naissance/carte nationale d’identité ou son passeport sécurisé par un QR code peut inspirer cette harmonisation).
Commerce électronique
– Elaborer un cadre légal sur le commerce électronique ;
– Mettre en place un mécanisme permettant de reconnaître les sites agréés;
– Développer la logistique ;
– Mettre en place des systèmes de paiements interopérables, instantanés et inclusifs;
– Régler la question de l’adressage des rues dans les villes africaines pour faciliter les livraisons.
Ce webinaire a été modéré par Maxime LOKOSSI, consultant en mésofinance et en finance digitale.