Des solutions financières sur mesure pour les petits exploitants agricoles à l’ère du numérique

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Author: Maxime Lokossi

Imaginez 600 millions de personnes, cultivant des terres de la taille de 1 à 4 terrains de football, nourrissant les populations du monde entier.  Il s’agit de petits exploitants agricoles. Ils sont un atout inestimable pour la sécurité alimentaire mondiale. Malgré leur taille, les petits exploitants agricoles produisent plus d’un tiers (environ 35%) des denrées alimentaires dans le monde et fournissent jusqu’à 80% de l’approvisionnement alimentaire en Afrique subsaharienne et en Asie, selon la FAO[i]. Malheureusement, leurs rêves de prospérité se heurtent à une dure réalité : un accès limité aux ressources, des infrastructures limitées ou un accès limité à des services financiers adaptés à leurs divers besoins.

Ce dernier défi est le sujet principal de ce blog. Comment se fait-il que les besoins des agriculteurs ne soient pas correctement pris en compte par les prestataires de services financiers ?

Traditionnellement, les services financiers pour les petits exploitants ont été comme l’agriculture en monoculture – des solutions « passe partout » pour un secteur diversifié. Cette approche « universelle » ne tient pas compte des défis et des aspirations uniques des différents segments d’agriculteurs. Un petit producteur pratiquant de l’agriculture de subsistance dans les zones rurales de la RD Congo a des besoins très différents de ceux d’un producteur de cultures de rente intégré dans une chaîne de valeur serrée en Côte d’Ivoire.

Heureusement, une nouvelle aube se lève. Reconnaître l’hétérogénéité des petits exploitants agricoles est essentiel pour libérer leur plein potentiel et, en ce sens, le CGAP met en lumière cette diversité en identifiant trois segments distincts[ii] :

  • Les agriculteurs non commerciaux : Ces producteurs de subsistance, qui se concentrent en grande partie sur les cultures de base (manioc, igname, haricot et maïs par exemple au Nigeria), sont confrontés à un engagement limité sur le marché et à un faible accès aux services financiers. Leurs besoins primaires tournent autour des services de paiement de base, des envois de fonds, du crédit mais aussi des outils de gestion des risques.
  • Les petits exploitants de la chaîne de valeur en vrac : En équilibrant les cultures de base et les cultures de rente (comme le coton au Bénin, le cacao ou le café en Côte d’Ivoire), ces agriculteurs ont une certaine intégration au marché mais manquent de technologies avancées. Leurs priorités comprennent l’accès au crédit, l’amélioration des liens avec le marché et les options d’épargne.
  • Les petits exploitants à chaîne de valeur serrée : Cultivant principalement des cultures de rente avec un accès à des technologies améliorées et à des partenariats formels, ces agriculteurs ont besoin de divers outils financiers tels que des assurances, des solutions sophistiquées de gestion des risques et des plateformes de transactions efficaces.

La révolution numérique offre un terreau fertile pour des solutions sur mesure. Le mobile money facilite les transactions sécurisées, l’analyse des données peut évaluer la solvabilité au-delà des méthodes traditionnelles, et les services d’information permettent aux agriculteurs d’acquérir des connaissances agronomiques cruciales. Pour les agriculteurs non commerciaux, les groupes d’épargne mobiles[iii] et les données météorologiques peuvent être des bouées de sauvetage. Les agriculteurs de la chaîne de valeur libre bénéficient de liens avec le marché en ligne[iv] et des options de crédit basées sur l’utilisation des données du téléphone mobile. Les acteurs de la chaîne de valeur serrée peuvent tirer parti de plateformes avancées de gestion des risques et d’assurances personnalisées.

Les prestataires de services financiers et les décideurs politiques doivent adopter un changement de paradigme. Les solutions « passe partout » appartiennent au passé. En comprenant les spécificités de chaque segment, nous pouvons concevoir et fournir des outils financiers numériques qui autonomisent véritablement les petits exploitants agricoles[v]. Cela se traduirait par :

  • Le développement de produits sur mesure : Des plans de micro-épargne pour les agriculteurs non commerciaux, au crédit basé sur les données pour les producteurs de cultures de rente, chaque segment a besoin de solutions sur mesure.
  • Des partenariats à fort impact : La collaboration avec les ONG, les acteurs de la chaîne de valeur et les entreprises technologiques peut combler le fossé entre les services financiers et les divers besoins.
  • Le renforcement de la confiance et des capacités : Les initiatives d’éducation financière et les stratégies de communication adaptées à la culture sont essentielles pour assurer l’adoption et le succès.

L’autonomisation des petits exploitants agricoles n’est pas seulement une question d’inclusion financière ; Il s’agit de libérer un écosystème agricole florissant. L’augmentation de la productivité, l’amélioration de la sécurité alimentaire et le dynamisme des communautés rurales sont les avantages de l’adaptation des services financiers à la mosaïque diversifiée de petits exploitants agricoles. À l’ère du numérique, il est temps d’aller au-delà de la monoculture c.-à-d. des solutions « passe partout » et de cultiver un paysage où chaque

 

[i] Pain pour le monde (2023) – Quels sont les défis des petits exploitants agricoles dans le monde ?

[ii] CGAP (2013) – Segmentation des ménages de petits exploitants : répondre à l’éventail des besoins financiers des familles agricoles

[iii] Amarante consulting (2020)- MaTontine : Digitaliser les groupements d’épargne traditionnels pour l’inclusion financière

[iv] APIF Côte d’Ivoire (2022)- Wi-Agri, une plateforme numérique qui met en relation les producteurs de noix de cajou et les acheteurs et établissements de financement

[v] CGAP (2017) – Numérisation du financement de la chaîne de valeur pour les petits exploitants agricoles

 

By Maxime Lokossi 

Ambassadeur francophone de la marque Digital Frontiers, ancien élève et membre de la communauté